Voyage en poésie : Amérique
Amérique du Nord
Yellowstone
Dans les yeux d’un passé vivant grâce aux légendes,
Court le tambour sacré d’un ancêtre chaman,
Et l’aile de sa main généreuse en offrandes,
Sur la douleur, posée, est comme un talisman.
La forêt dégrafait ses fourrures d’ébène,
Pour un appel des dieux trouant l’éternité.
Fumerolles, geysers, en leur transe lointaine,
Éveillaient les esprits du volcan redouté.
Des eaux saphir, turquoise habillèrent de brume
La peau si chaude et nue, offerte au jour vermeil,
Des sources l’invitant sur leur couche d’écume.
Les roches ont volé ses couleurs au soleil !
Tel un acte de chair, la prière sans âge
Mariait l’âme indienne au lieu surnaturel,
Révélateur d’un rêve à la bouche sauvage
Qu’on nomme Yellowstone, abîme intemporel.
La mémoire vacille au rythme de la danse ;
L’aigle et l’ours imités par le corps du chasseur,
Sous l’immense parure agitée en cadence :
Volent plumes et poils, cailloux porte-bonheur !
Homme déraciné, chaque instant, j’imagine
Le chant de mes aïeuls autour du feu tribal,
Le troupeau de bisons broutant, dès l’origine,
Quelques lambeaux d’aurore au timbre de cristal.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Ces lumineux voiliers de l'âme"
Au pays Navajo
Au pays Navajo, quand tu t’endormiras,
Sous les plumes du cercle attrapeur de beaux rêves,
Un géant de grès rouge, aux bras comme des glaives,
Défendra le sommeil où tu te berceras.
Là, je te rejoindrai, moi l’oiseau de passage,
Ivre de plaisirs vains et de vols sans retour.
Mon aile de turquoise aura caché le jour
Dont les esprits mauvais noircissent le message.
Sur les sables brûlants, les dieux ont dessiné
Ton visage sauvé des légendes perdues
Pour dévier mon regard des rives défendues
Et me rendre aussi pur qu’un tendre nouveau-né.
Mes baisers rougiront ton front de blanc satin ;
Reviendra l’harmonie aux voix de sources fraîches,
D’un geste affectueux, baigner tes longues mèches
Que les braises du vent frôlaient chaque matin.
La danse du chamane, au milieu de la nuit,
Pourra voir l’horizon s’allonger sur ta couche
Puis tremper ses couleurs au souffle de ta bouche :
L’infini ravivé nous unira, sans bruit.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Derrière l'éventail de plumes"
New York
Cité de nos futurs émergeant du silence,
Comme un envol d’oiseaux sur l’aube de nos fronts,
Au jour miraculeux, ton âme se balance,
Le long de la rivière aux brillants ailerons.
Dans un bourdonnement qui ne cesse la nuit
Par l’océan câlin recouverte de voiles,
Tes falaises de verre où chaque moment luit,
Affectueusement, retiennent les étoiles.
Coule un peuple vaillant de toutes les couleurs,
En tes veines d’espoir, en ton regard de flamme.
Après la tragédie, apaisant les douleurs,
Géante aux mains d’acier, tu livres ton sésame :
Un vent de liberté pour précéder ton pas,
Sur tes flèches d’azur, un luxe d’énergie,
Entre tes gratte-ciels, un refus du trépas,
Cela déclenche, en nous, l’éternelle magie.
Ne crains pas, ô New York, l’oubli de ton passé,
Dans ta course au progrès d’amazone des nombres,
Car le temps sauvera d’un sommeil commencé
Ton cœur de brique rouge endormi par les ombres.
Dans mon rêve pour toi, de retour au bercail,
Je me demande encor où va ce taxi jaune,
Peut-être à Central Park, la pelouse en chandail,
Cet automne étalant des dorures d’icône.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Dans le secret de mes silences"
Chicago
Lorsque je suis tombée amoureuse de toi,
Les gratte-ciels gobaient la pulpe flamboyante
Des étés indiens dont le sceptre de roi
Dessinait des jardins sur ta robe seyante.
Sur le char bleu des vents, debout, tu m’accueillis,
Tes mille bras de verre élancés vers les nues
Qui berçaient notre soir de leur frais gazouillis,
Et ton discours m’ouvrit des pages inconnues :
Celle du peuple fier des Potawatomis
Dont l’âme chante encor sur le lac ou ses rives,
L’épopée exaltant ces pères et ses fils
Ayant quitté l’Europe avec leurs forces vives.
Ville spectaculaire où mon regard est d’eau,
Tu jetais ton corsage au fil de la rivière.
Quand la nuit fut venue, en fermant le rideau,
Pour moi, tu dénouais tes cheveux de lumière.
J’admire tes chefs d’œuvre offerts au firmament,
Tes hommes courageux, à la fois durs et tendres,
Bâtisseurs de génie ayant trouvé comment
Te faire au cours des temps renaître de tes cendres.
Sculpturale beauté me troublant chaque fois,
Jalousée en secret des divines lanternes,
Un orchestre de jazz invente, pour ta voix,
L’ode à l’architecture ainsi qu’aux arts modernes.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Dans le secret de mes silences"
Mississippi
(J'étais un esclave)
Lorsque mon chant d’esclave appelle ton brouillard
Qui suspendra l’ouvrage en repos bénéfique,
Dans la force de l’âge, ayant l’air d’un vieillard,
Sur les champs de coton, mon sang devient musique.
Prendre pour ciel de lit, si la lune m’attend,
Le chêne centenaire époussetant ses franges,
Fera croire à mon rêve au regard trop distant
Qu’il est des jours meilleurs, sur les ailes des anges.
Pour les indiens Natchez, alors Père des Eaux,
Tu mûrissais les fruits sur la berge escarpée,
Dans le balancement de tes forêts d’oiseaux.
Aujourd’hui, serre-moi dans tes bras d’épopée !
Souffleras-tu demain ce vent de liberté
Qui donnera la joie à mes enfants sans rire
Et les jeux éblouis d’un tout premier été
Que chacun d’entre nous, depuis longtemps, désire ?
Tes méandres suivront le vol des cormorans,
Mes yeux s’embraseront au creux d’un nid de rides,
Par le secret espoir d’échapper aux tyrans,
À travers les bayous* et leurs cyprès humides.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Dans le secret de mes silences"
*Bayous : ruisseaux et marécages qu’alimente le Mississippi, en Louisiane.
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BESbs
Quatrain du Delta
En route vers le sud, le vent fera gémir
Le delta, ce berceau des notes légendaires.
C’est l’unique trésor d’un peuple au long soupir,
Chantre de la douleur qu’il sublime en prières.
Au fil du souvenir de noms étincelants,
Quand le blues a rythmé notre pouls nostalgique,
Le chemin s’est posé dans les pas chancelants
D’une ville fantôme* où survit la musique.
Pour l’immense voyage aux confins de la nuit,
L’âme de B. B. King a quitté sa guitare.
Il reste, dans nos yeux, cette larme qui luit
Comme un rêve éternel dont le soleil se pare.
Marilène Meckler
* Il s’agit de Clarksdale, ville dans le Mississipi qui est
considérée comme une des villes clés du "Delta blues"
Archipel des Keys*
Sous les doigts caressants d’une brise féline,
Deux ravissants voiliers partaient en amoureux,
Nager dans la lumière où le soleil s’incline,
Flotter sur une estampe aux pastels généreux.
Leur voyage inouï semblait survoler l’onde,
Griffer le firmament, d’un sentiment béni,
Et toucher cette étoile à l’humeur vagabonde
Qui danse à l’horizon où s’écrit l’infini.
Archipel enchanteur tel un village d’îles,
Tu marches, les pieds nus, sur les vagues d’argent
Accrochant ton regard qui ne rêve qu’idylles
Aux brumes de satin qui dorment sous le vent.
Océan Atlantique et mer des Caraïbes
Gardent jalousement cet éden tropical,
Sirène aux chants divins dont les charmes s’exhibent,
Royaume où les bateaux rêvent d’aller au bal.
Points de suspension sur la page turquoise,
Des îlots de mangrove achèvent le roman
Des pêcheurs, un des leurs, Hemingway que l’on croise,
Embellissant l’exploit, quêtant le talisman.
Couleur et fantaisie, ensemble pétillantes,
Jouent avec ces maisons debout sur pilotis,
Comptent, sans se tromper les écailles brillantes
De la houle bercée, en ses doux chuchotis.
Lorsque les perroquets viennent donner spectacle,
Sur un air de salsa qui déchaîne le soir,
Le drapeau flotte, encore et porte le miracle
D’un peuple américain aux couleurs de l’espoir.
Marilène Meckler Tiré du recueil "Dans les yeux des poèmes"
*Les Keys : archipel d’îles tropicales au sud de la Floride
Amérique du Sud - Amérique Centrale
Chili
Torres del Paine
Au pays enchanteur des « Tours de la rivière »,
La déesse Nature, en habit de gala,
Sur nos yeux éblouis, danse avec la lumière,
En délaissant la steppe, en sommeil, au-delà.
Dans les pas des géants qui croquent les nuages,
Sa blonde chevelure ondule aux vents puissants
Et les dents de basalte égrènent leurs messages,
Sous le vol des condors, aux regards si perçants.
Des camaïeux de verts parlent aux plages noires
Soupirant de plaisir dès les premiers matins.
Outremer et turquoise, émeraudes en moires
Font chanter le regard des lacs diamantins.
Quand le soleil vient boire aux neiges éternelles,
L’aiguille de granit, en tricotant le ciel,
Habille, de vertus, ces terres immortelles
Et la lagune entonne un cantique de miel.
Les torrents, le glacier rivalisent d’audace
Pour dépasser la course et les multiples bonds
Des guanacos peureux qui, soudain, trouent l’espace,
Découvrant le chemin des cirrus vagabonds.
C’est un endroit sauvage où commença le monde !
Ici, la main de l’homme ébloui de beauté
N’a pas osé troubler cette paix si féconde.
Que demeure toujours ce paradis bleuté !
Marilène Meckler (Chili - Avril 2023)
Tiré du recueil "Avec les frissons de l'âme"
Torres del Paine : Parc National du Chili où coule la rivière Paine
Guanacos : Camélidés sauvages proches du lama
Argentine
La Boca (1)
(À Benito Quinquela Martín, peintre argentin)
Toi généreux artiste aux paumes de blé mûr,
Un éclat de génie anima ta palette.
Philanthrope estimé, dans ton regard si pur,
Voyageaient les espoirs de ce peuple sans fête.
Là, si près du rio fier de trouver la mer,
Priaient avec ferveur tes pinceaux de lumière,
Pour changer la pénombre, en havre sans hiver
Grisant d’éternité chaque rose trémière.
C’est comme un échiquier aux multiples couleurs ;
Aux vieux pas fatigués, il donnerait courage.
Aux façades de tôle affichant leurs pâleurs,
Il offrirait les jeux d’une enfance en voyage.
Ô, natif du quartier des peuples immigrés,
Ami des pauvres gens, des pêcheurs téméraires
Et des marins génois qui chantaient, inspirés,
Merci pour ton grand cœur, tes œuvres nous éclairent !
Le tango, dans la rue, a repris ton refrain,
D’un espoir qui jaillit de la mélancolie.
Il a bu le maté qui préserve l’entrain,
Et dans les cieux obscurs, rechercha l’embellie.
Marilène Meckler Tiré du recueil "Avec les frissons de l'âme"
1- Boca : quartier populaire de Buenos Aires
Argentine
Des chutes d’Iguazu vers la Terre de Feu,
Des pampas des gauchos à la Patagonie,
Ton long regard de braise a inventé ce jeu
Où toutes les couleurs jouent une symphonie.
Quand flottent les tangos, sur l’odeur du maté,
Des vents de l’Antarctique, aux chaleurs des tropiques,
La passion du foot, comme un hymne chanté,
Unit les argentins, dans des foules épiques.
De la plaine infinie aux sommets enneigés,
Le décor se transforme et s’offrent des visages
Inspirés de l’Europe aux destins mélangés,
Ou des amérindiens nés dans ces paysages.
Et le sens de la fête emporte les soucis ;
Leur amour de la Vierge éclaire les églises.
L’odeur d’un asado, par les jours éclaircis,
Vogue sur les repas où les tracas s’enlisent.
Si les dents des glaciers croquent un bout d’azur,
Se dorent au soleil, mille steppes herbeuses,
Les pieds baignés dans l’eau d’un turquoise si pur,
Que d’envie, ont pâli les pierres précieuses.
Tourbières et forêts au lichen chevelu,
Terre des Yamanas autour des feux vivaces,
Dans la baie admirant d’un regard résolu
Le soleil se lever, près du vol des rapaces.
Oiseaux du bout du monde autour de l’archipel,
Bernaches, cormorans, autres pingouins et sternes,
D’un univers où chante un bleu presqu’irréel
Comme un conquistador brandissant ses lanternes.
Toujours, je reverrai, dans mes soirs d’astrakan,
Tels des miroirs brisés, les Andes qui descendent,
Pour rêver librement au bord de l’océan,
D’un pays aux valeurs qui, toujours se transcendent.
Marilène Meckler Tiré du recueil "Avec les frissons de l'âme"
Asado : viande grillée
Yamanas : une des tribus indigènes qui peuplaient la terre de feu
Pérou
Péruvien
Je viens de ce pays qu’étire l’océan
Sous le fin paréo de l’équateur mythique.
Une dernière offrande à ma terre d’antan
Permit de célébrer mon départ en musique.
J’ai quitté mes amis, éleveurs d’alpagas,
Fils de l’Altiplano sous l’étoile prônée,
Pour aller habiter les nouvelles sagas
D’un sol européen signant ma destinée.
La palette des dieux brillant comme un été
Par le regard ému de la neige éternelle,
Se mirait en mes yeux buveurs de vérité
Que livrait aux Anciens la Nature charnelle.
De la barque amarrée aux îles de roseaux,
J’ai contemplé mon lac, tendre époux de la lune ;
C’est la dernière fois que je touchais ses eaux,
Croyant me protéger de la moindre infortune.
Contrée où les forêts sauvèrent, des pilleurs,
Les antiques cités, pendant que les vallées,
Grâce au condor sacré, rêvaient de jours meilleurs,
Je t’emporte avec moi sur mes tempes hâlées.
Prêtresse encor vouée au culte du soleil,
La mémoire du sang parlera dans mes veines,
Citant des mots incas ciselés de vermeil
Et d’or trouvés au fond des tombes péruviennes.
Alors, loin de mon toit, j’ouvrirai grand les mains
Pour fleurir votre église aux âmes disparues,
Et je ne survivrai de nombreux lendemains
Qu’en jouant de la flûte, au détour de vos rues.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Derrière l'éventail de plumes"
Brésil
Service gratuit et accessible à tous
Iguaçu ( Message de la nature)
J’ai donné mes forêts aux peuples de toujours
Et mes galops d’argent dessus les précipices,
Ont ébloui leurs yeux, tout au long du parcours
Qui frissonne d’embruns, des cieux jusqu’aux abysses.
Mes brumes, mes soleils s’échappent du berceau,
Par une matinée où commence le monde
Et rejoignent le vol puissant comme un vaisseau
Des toucans lumineux, loin au-dessus de l’onde.
Mes longs cheveux tressés d’arcs-en- ciel caressants
Protègent avec soin les étoiles tombées
Des grands paradis verts aux secrets oppressants.
Y jouent les coatis, avec les scarabées.
Ruissellent, sous mes pieds, brillant de mille feux,
Ces gemmes qui venaient des trésors d’émeraude.
La jungle, dans mes bras, peut me confier ses vœux
Alors, enveloppés de son haleine chaude.
Les voyageurs venus des innombrables lieux
Respirent, aujourd’hui mes notes brésiliennes.
Jadis, dansaient, sans fin, mes tribus et les dieux,
Au rythme furieux de mes eaux diluviennes.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Ils se poseront sur vos lèvres"
Samba
Toi, princesse au grand cœur des favelas grimpantes,
Deviens, en février, l’âme du carnaval ;
Dans un rythme envoûtant, tes pieds nus, sur les pentes,
Ensorcellent les yeux du monde tropical.
Avant le tourbillon des couleurs et des plumes,
Le grand christ rédempteur te serre dans ses bras.
Guanabara, la baie a caché sous les brumes,
Ses divins camaïeux et les vols des aras.
J’aime ta peau brillante au goût de mangue mûre.
Tous les cariocas rêvent de t’enlacer,
Quand ton jupon d’écume, en cachette, murmure,
Au vent d’Ipanema1, des secrets à bercer.
Quand tu feras danser les pauvres et les riches,
Petite fiancée au bras du grand Rio,
Tijuaca2 vêtira ses feuillages fétiches,
Pour honorer ta joie, alors, avec brio.
Surdos3 et chocalhos se parlent en cadence ;
Roucoulent les cuicas, tintent les agogos.
L’océan fait la fête et la ville s’élance,
Si haut qu’elle pourrait embrasser le cosmos.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Ils se poseront sur vos lèvres"
Ipanema1 : une des plages de Rio de Janeiro
Tijuaca2 : la forêt urbaine de Rio de Janeiro
Surdos : chocalhos, cuicas, agogos : instruments de musique de la samba
Mexique
L’église de San Juan Chamula
(Mexique)
Ils viennent, en famille, allumer, par milliers,
Les espoirs d’un meilleur et les feux des bougies,
Quittant les hauts plateaux, sous les bougainvilliers,
La prière serrée, entre leurs mains rougies.
L’église à l’âme indienne ouvre, tout grand, sa croix,
Comme une mère aimante, aux rites du chamane ;
Chaque offrande païenne endort les désarrois
Et les pires douleurs desquels la plainte émane.
Leurs yeux buveurs d’eau noire aux volcans assoupis
Ne quittent plus les saints du règne catholique,
Revêtus de couleurs, sur l’étrange tapis
Du panthéon maya prenant l’air angélique.
Lorsque l’alcool devin, sur la flamme, soufflé,
Dans les embrasements, lit de cléments augures,
Des poules et des œufs, sur l’autel étoilé,
Garnissent le panier des puissances obscures.
Les branches de sapin dont ils couvrent le sol
Invitent la forêt, dans leur blanc sanctuaire :
Esprits des bois secrets qui rêvent d’un envol
Pour les rives d’azur d’un sauvage estuaire.
Ensemble, ils rejoindront la terre des aïeux,
Rassurés pour demain, le cœur en bandoulière.
Sur leur nuque, posé, l’astre* victorieux
A réduit, à jamais, les lunes, en poussière.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Dans le secret de mes silences"
* L’astre est le soleil. Les mayas effectuaient des sacrifices humains,
pour lui donner la force de vaincre la nuit.
Guatemala
Antigua
(Guatemala)
Au pays des couleurs qui chantent les histoires,
Sans répit, protégeant des foudres du volcan,
Les trésors d’un empire ébloui de victoires,
Tu caches ton secret sous l’aile du toucan.
Tous les bougainvilliers jalousent, dès l’aurore,
Ta palette de peintre, amoureux du soleil.
La nuit n’ose venir car ton pinceau picore
Ocres et vermillons, même dans son sommeil.
Pour tes jardins secrets, pour tes blanches églises,
Ton âme a les soupirs des infantes, jadis,
Quand l’orgue triomphant lançait des vocalises,
Près du retable d’or incrusté de lapis.
Ton charme suranné, dans le soir, nous envoûte.
De tes cendres, toujours, tu renais, fièrement,
Voluptueuse, calme et réfractaire au doute.
Tes fontaines en pleurs trouvent l’apaisement.
À chacun de tes pas, s’ouvrent les orchidées.
Ta plume de poète est celle du quetzal,
Cet oiseau qui se meurt sous des lunes ridées,
Lorsqu’on le met en cage, instant de noir cristal !
Admirant ce héros né sous la forêt vierge
Qui transporte, en son bec, la lumière du jour,
Tu gardes le passé dans un berceau de serge
Où s’allument les yeux du véritable amour.
Marilène Meckler
Tiré du recueil "Dans le secret de mes silences"
Textes : Marilène Meckler - Photos et réalisation : René-G. Meckler - Tous droits réservés